Vigilance sur l’héritage nucléaire en Limousin

Publié le :

Le collectif "Sous nos pieds" vient de se créer en Limousin dans l’objectif d’informer la population et d’attirer l’attention des pouvoirs publics sur l’héritage que constitue les anciens sites d’exploitation minière de l’uranium et de stockage des déchets radioactifs.

Un constat : des pollutions radioactives en limousin causées par l’exploitation industrielle de l’uranium :
 Le Limousin, depuis l’après-guerre jusqu’à la fermeture du dernier site français en 2001, a été le principal pourvoyeur de l’uranium en France avec une production totale de 36 000 tonnes d’uranium (sur les 76 000 tonnes produites en France).
 L’ensemble des 70 chantiers limousins (mines à ciel ouvert ou travaux souterrains), les 2 usines de traitement chimique du minerai, et les 6 sites de stockage de déchets, constituaient le plus grand complexe d’exploitation et de traitement d’uranium en France.

Au cours de la deuxième moitié du XXème siècle, les Monts d’Ambazac étaient maillés de galeries et de puits de mine comme ici à Margnac (Commune de Compreignac) - Photo Novembre 1992.

Si l’exploitation a bien cessé aujourd’hui, ce passé industriel a laissé en Limousin des quantités considérables de déchets

 24 millions de tonnes de déchets de traitement (les résidus) ont été produits dans les usines afin d’extraire l’uranium des roches. Ces résidus contiennent encore 5 à 10% de l’uranium, les autres éléments radioactifs des roches (thorium, radium, etc.), et l’ensemble des substances chimiques employées pour extraire le seul uranium : Soit environ 80% de la radioactivité initiale.

 Plus de 60 millions de tonnes de roches radioactives ont été stockées en verses (les stériles miniers) sur les anciens sites miniers. Ces matériaux sont trop pauvres en uranium pour être traitées de façon rentable, mais sont plus radioactifs que les roches de surface.

 Des milliers de tonnes de ferrailles et déchets divers contenant des matières radioactives ont été introduits dans certains sites : ferrailles contaminées provenant d’anciennes usines de traitement, fûts de conditionnement du yellow cake (concentré d’uranium),
déchets militaires…

L’exploitation passée et ces stockages de déchets ont par ailleurs des impacts environnementaux importants et actuels

 Il y a les fuites d’éléments radioactifs de ces stockages par les eaux entraînant une dissémination et une accumulation de radioactivité
dans les sédiments des étangs, zones humides et cours d’eau des secteurs concernés.
 Il faut aussi considérer ce phénomène non contrôlé et constituant des pollutions de l’environnement telle que la dispersion de millions de tonnes de roches parfois fortement radioactives (les stériles), vendues ou cédées pour la construction de routes, remblais, ou habitations.

Des risques à long terme considérables :

 Sanitaires et écologiques : Une pollution grave du milieu qui va se prolonger pendant des siècles. Les stériles, le transport de résidus sans précaution, les stockages de résidus divers, sans parler de l’entreposage de produits de démantèlement provenant de l’extérieur, sont responsables d’une pollution diffuse des sols, de l’air et de l’eau qu’il sera très difficile et très coûteux de maîtriser. Face à cet enjeux, quel impact de ces pollutions sur la santé des populations ? Quels impacts sur les milieux et espèces naturels ?

 Économiques : Une image de marque du territoire fortement dégradée par cet héritage nucléaire : impact sur les produits touristiques, agricoles, sur les marchés immobilier et foncier. Des restrictions actuelles et à venir dans l’usage des sols : interdictions de captages d’eau, de structures d’accueil du public, de constructions, de
terrassements... Face à ces enjeux, quel dédommagement ? quels coûts de réhabilitation ?

 Sociaux : Un déficit démocratique révélé par le manque d’information sur la réalité de ces pollutions, la parole laissée aux seuls experts sans qu’aucun débat public sur les solutions à apporter ne soit organisé. Un défaut de justice sociale : qui va payer l’addition dans le futur ? Une transmission de fait des problèmes aux générations
futures.

Face à ces enjeux, quelle responsabilité vis à vis des générations futures ? Quels engagements des pouvoirs publics actuels, nationaux et locaux ? À quand une information complète sur la localisation et la surveillance de ces pollutions ?

Des réponses de court terme insuffisantes :

La clôture des sites : une réponse partielle et de court terme
Cette réponse est proposée depuis juillet 2009 par le ministère de l’écologie suite à un reportage alarmant de France 3. Le grillage ne suffira pas ! On ne pourra se contenter de délimiter des zones d’interdiction d’accès pour considérer avoir réglé le problème.

La restauration paysagère artificielle : cacher pour mieux oublier ?
Principale mesure de réhabilitation opérée par l’ancien exploitant AREVA (plantations d’arbres ou enherbement sur les dépôts de stériles par exemple), elle ne règle rien et amplifie la perte de mémoire des sites.
La surveillance actuelle des sites : inadaptée et partielle. Les services de l’Etat contrôlent enfin les anciens sites, ce uniquement depuis 2005 (suite à la mise en cause de leurs actions lors du procès d’AREVA).

Mais que peuvent-ils contrôler ?
Sans connaissance des réseaux hydrologiques de dissémination, sans connaissance totale de la localisation des déchets, et sans normes de rejets claires et justifiées par des études sanitaires et environnementales ? Il manque encore à ce jour une méthodologie de réhabilitation et de surveillance à long terme des sites. Cela concerne en particulier la gestion des eaux (la circulation souterraine des eaux n’est même pas connue !), ou le stockage des sédiments contaminés des lacs (stockés aujourd’hui dans une mine non confinée et dont la radioactivité revient rapidement dans le milieu comme à Saint-Pardoux, recontaminé un an après avoir été curé. Ce manège risque de durer des siècles).

Enfin, sans aucun montant financier avancé pour la réhabilitation, toute crédibilité aux propositions de l’exploitant disparaît.

Pour une conférence de citoyens
Les acteurs engagés dans le collectif réclament que la question de l’héritage nucléaire du limousin et les enjeux qui lui sont associés soient rendus publiques, et que face à l’inactivité et l’inefficacité actuelle des décideurs publics (Etat et collectivités locales), la population limousine soit reconnue partie prenante.

Le collectif demande :

 Une information contradictoire, complète et accessible en particulier sur l’ampleur des pollutions, sur la localisation des stockages, sur les niveaux de risques connus ou potentiels,
 Une évaluation claire des modes de réhabilitation et de gestion possibles des sites,
 En complément de cet état des lieux dressé par les experts, il s’agit d’obtenir une véritable négociation environnementale pour aboutir à un niveau de risque accepté, construction sociale qui doit résulter d’un compromis entre l’exploitant, l’Etat, les élus, les associations, les citoyens.
 Pour atteindre ces objectifs, une conférence de citoyens doit être mise en place pour concevoir un programme de réhabilitation des friches uranifères du Limousin. Cette conférence proposerait la détermination d’un niveau de décontamination défini par rapport au risque accepté.

Les premiers signataires : ADEPAL / Amis de la Terre Limousin / ATTAC 87 / ATTAC 23 / Limousin Nature Environnement / NPA / Oui à l’avenir / Sortir du Nucléaire 87 / Sources et Rivières du Limousin / Velorution / Sud / Jeunes Verts / Verts Limousins

Pour adhérer au collectif Sous nos pieds, adressez un mail à pmperinaud@yahoo.fr

En 2009

AgendaTous les événements

Annonces